Que se passe-t-il quand le racisme s’immisce dans nos relations intimes ? Car oui, c’est « facile » de détester les racistes qu’on voit à la télévision pour qui l’on ne ressent rien mais on parle beaucoup moins du racisme qui régit nos relations familiales, amicales ou encore amoureuses. Malgré tout l’amour qu’on leur porte, nos proches ne sont pas à l’abri d’avoir des comportements racistes à notre égard.

Aujourd’hui, je parlerai plus spécifiquement d’amitiés. De nos potes, de nos copains, de nos copines, de nos amis et amies, bref de ces personnes qui rythment notre quotidien depuis notre tendre enfance et qui sont censées nous apporter que du positif.

Je lève le voile sur ce sujet parce que je sais par expérience que ces situations peuvent nous affecter durablement dans notre rapport à notre identité mais aussi dans notre estime de nous-mêmes, et ce parfois encore plus qu’un inconnu qui nous insulterait de « sale noir.e » dans la rue.

Certains et certaines d’entre vous qui n’ont peut-être jamais rencontré ce type de situations doivent être en train de se demander « mais de quoi donc parle-t-elle ?! ». Je peux tout à fait comprendre la question et c’est pour cette raison que dans la première partie de cet article, je vous décris 4 types d’amitiés problématiques auxquelles nous pouvons être confrontés en tant que personnes noires.

Ce récit s’appuie sur mon expérience personnelle ainsi que sur celles de mes amies noires et d’abonnés qui ont répondu à un sondage que j’ai lancé sur mon compte Instagram (d’ailleurs, n’hésitez pas à aller me suivre ! ).

Cet ami qui n’a jamais vu de Noirs

Pour ma part, je reconnais très vite cet.te ami.e par la nature des questions ou des remarques qu’il ou elle me fait :

« Mais les Noirs vous bronzez ?! »

« Les Noires vous avez pas besoin de vous maquiller »

« Pourquoi vous avez des genoux tout noirs ? »

« Comment ça se fait que t’aies un nom de famille français ? »

« Est-ce que vous vous lavez les cheveux ? »

Cet.te ami.e te prend souvent pour le représentant ou la représentante des personnes noires et en profite pour te poser toutes les questions qu’il ou elle s’est toujours posé.e sur nous sans avoir de réponse. Vous me direz qu’il n’y a pas de mal à se poser des questions et à faire de remarques mais la particularité de celles-ci c’est qu’elles sont souvent étranges, voire absurdes. Elles sont un mélange de choses vues à la télévision, lues dans les médias, répétées par des proches et/ou le fruit d’une imagination trop débordante.

Ces questions et ces remarques nous font comprendre de manière indirecte qu’on est « différent » de la norme blanche, une sorte de catégorie à part entière dans la société. Je me demande même si ce n’est pas à travers celles-ci que j’ai compris que j’étais noire et que donc je ne serai jamais dans la norme. Il n’est ainsi pas étonnant de constater que tant de personnes noires construisent leur identité dans la différence et l’altérité puisque même nos amis peuvent porter ce regard sur nous.

Cet ami qui adore les blagues racistes

« Est-ce qu’en Afrique c’est comme dans Kirikou ? »

« Est-ce qu’il y a des routes en Afrique ? »

«  C’est pas grave si tu te fais agresser, t’as qu’à faire la Noire méchante ! »

« Hey, c’est soirée disco aujourd’hui ! » (en pointant mes cheveux crépus)

Voici le type de blagues (très drôles, n’est-ce pas ?) auxquels on peut avoir droit en tant que personne noire de la part de nos amis. En effet, le problème lorsqu’on est ami avec une personne qui a un penchant pour l’humour raciste c’est que cette dernière se sent la liberté de faire des blagues qu’elle n’aurait pas osé faire à un inconnu. J’ai vite saisi qu’il était inutile d’expliquer en quoi ces blagues étaient déplacées ou basées sur des stupidités. De fait, cet.te ami.e s’en fiche de savoir si les stéréotypes en jeu sont réels ou pas et il ou elle s’en fiche encore plus des conséquences que ces stéréotypes peuvent avoir. Il ou elle s’amuse simplement de rire de ces clichés. On devient pour ainsi dire l’ami.e noir.e à qui on adore faire des blagues sur sa « différence ».

Cet ami qui oublie que tu es Noir

Cet.te ami.e est capable d’avoir des propos particulièrement offensants envers les personnes noires devant toi, comme si tu ne l’étais pas toi-même. Je l’explique avec le recul de deux manières différentes. D’une part, ce ou cette pote estime que ces propos sont tout à fait normaux car malheureusement, certains propos racistes sont totalement banalisés dans notre société. D’autre part, ce ou cette pote te voit comme « un.e Noir.e pas comme les autres ». J’en parle en détail dans cet article mais pour résumer, il y a dans sa tête une masse noire uniforme et puis en haut, toi la fameuse exception ! Ce schéma de pensée lui permet à la fois de te faire un compliment et de rabaisser les autres personnes noires.

Voici deux exemples concrets :

« T’es la plus belle noire que j’ai jamais vu »

« Putain ça me manque quand j’étais petit et qu’ils [les Noirs] restaient dans leur cité »

Je considère que c’est l’une des situations les plus violentes que l’on peut subir en amitié parce qu’on ne s’attend tout simplement pas à entendre de tels propos de la part d’un ou d’une ami.e. Cette phrase raciste prononcée au détour d’une conversation t’ouvre soudainement les yeux sur cet.te ami.e que tu trouvais jusque-là ouvert.e d’esprit et surtout, elle te laisse sans voix pour « défendre » ta communauté comme tu aurais peut-être aimé le faire. Tu finis par y repenser les jours suivants en te demandant comment tu aurais pu mieux réagir…

Cet ami qui vit dans un monde des bisounours

Sans aller jusqu’à nier l’existence du racisme, cet.te ami.e peine à comprendre ce qu’il implique dans nos vies. Dans le cas d’un.e ami.e blanc.he, ce ou cette dernière n’a pas encore pris conscience de tous les avantages que lui octroyait sa blanchité. En somme, ce ou cette pote estime qu’il ne faut pas trop parler de couleurs ou qu’il ne faut pas voir du racisme partout parce que cela risquerait de créer des divisions dans la société. Voici les phrases préférées de cet.te ami.e :

« Je ne vois pas les couleurs, on est tous des êtres humains »

«  Je comprends pas pourquoi les Noirs parlent autant de couleur de peau »

« Il n’y a pas à être fier de sa couleur de peau »

En général, ce type d’amitiés nous contraignent à minimiser ou occulter nos expériences de personnes noires par peur de créer un sentiment de malaise ou de ne pas être compris.

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Avez-vous déjà vécu une amitié similaire à celles décrites ci-dessus ? Ou vous êtes-vous reconnu.e dans l’un de ces profils ? J’espère que cet article aura dans tous les cas pu vous éclairer. Dans la deuxième partie de cet article, je parlerai de la difficulté de gérer ces amitiés ou de s’en éloigner pour se préserver. Restez connecté.es 🤎 !