Je suis votre pire cauchemar, Kiyémis

Hola ! Aujourd’hui, je suis très contente de prendre ma plume pour vous faire part de ma dernière lecture : Je suis votre pire cauchemar, de Kiyémis (2022). Il y a des lectures dont je suis OBLIGÉE de vous parler sur le blog, et Je suis votre pire cauchemar en fait partie. Kiyémis est une poétesse et écrivaine afroféministe que j’ai découverte il y a quelques années grâce à son recueil de poèmes À nos humanités révoltées. Elle était présente au festival Overbookées et j’étais très curieuse de me procurer son essai qui s’attaque à la grossophobie avec une approche intersectionnelle.

Dans Je suis votre pire cauchemar, elle livre son parcours de femme noire et grosse dans une société sexiste, grossophobe et raciste. On pourrait penser qu’il est superficiel de parler de beauté ; cependant les mots de Kiyémis nous montrent à quel point la grossophobie affecte l’accès aux ressources mais aussi l’estime et l’amour de soi, en somme l’humanité des personnes grosses. Je ne suis pas grosse mais j’ai ressenti beaucoup d’empathie pour Kiyémis tout au long de l’essai, qui, malheureusement, a dû naviguer dans une société où son corps est censé être « le pire cauchemar ». Kiyémis balance des vérités dont j’étais déjà convaincue, mais qui méritent d’être criées plus fort pour mettre fin aux mécanismes d’oppression qui touchent les corps « hors normes ».

Pour vous donner un aperçu du livre, voici cinq sujets qui sont abordés et qui ont pu résonner en moi en tant que femme noire :

La grossophobie de mère en fille

C’est une triste vérité qu’il ne faut pas cacher : le cercle familial est l’un des premiers espaces où nous sommes confrontés à un grand nombre d’oppressions. D’ailleurs, le racisme familial est l’un des thèmes que j’aimerais aborder sur ce blog tôt ou tard. Kiyémis nous confie que c’est à travers le regard de sa mère qu’elle a appris à voir les femmes grosses comme moches.  Toutefois, comme l’explique si bien Kiyémis, nos mères sont aussi des victimes de cette société patriarcale, qui leur a mis dans la tête une montagne d’injonctions grossophobes (sexistes, racistes, coloristes, etc.) qu’elles nous transmettent inconsciemment ou pas. Le patriarcat est bien le coupable à blâmer car il dresse les femmes les unes contre les autres, y compris les mères et leurs filles.

L’héritage de nos mères

Kiyémis raconte que bien que sa mère lui ait légué des normes patriarcales, elle l’a aussi éveillée aux idées féministes et antiracistes, en lui apprenant à ne pas avoir peur de se battre contre toutes les formes d’injustice. Je me suis pleinement reconnue dans ce passage car j’ai connu ce même paradoxe dans mon foyer familial. J’y ai subi des violences sexistes et racistes mais je pense que je lui dois en partie mes convictions afroféministes.

La validation masculine

La construction de la féminité est malheureusement trop corrélée à la validation masculine. La validation masculine étant plus difficile à décrocher quand on a un corps hors norme (gros, non blanc, handicapé, etc.), la construction de la féminité est d’autant plus ardue pour des femmes comme Kiyémis. Même sans la connaître, je suis très fière de voir la femme qu’elle est devenue aujourd’hui qui prône haut et fort l’amour de soi.

L’invisibilité dans l’espace de la séduction

Ce passage m’a rappelé l’ouvrage Amours silenciées. Repenser la révolution romantique depuis les marges, de Christelle Murhula. Ce livre traite de l’inégal accès à l’amour pour les femmes en dehors des normes. L’expérience de Kiyémis en est un très bon exemple. J’ai été très touchée par cette forme de solitude qu’elle décrit et dans laquelle de nombreuses femmes se reconnaîtront à bien des égards.

Avoir honte de soi et être féministe

C’est certainement le passage le plus déculpabilisant du livre. Kiyémis se confie sur la difficulté de se détacher des pensées grossophobes qui lui collent à la peau depuis l’enfance, malgré son militantisme. Il est beaucoup plus facile de rêver de perfection que d’une société émancipée où chaque corps aura sa place.

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